La petite barbare, Astrid Manfredi
La petite Barbare, c'est elle effectivement...mais ce n'est pas vraiment de sa faute. Coupable de quoi? D'avoir juste regardé? Et alors? Elle n'y peut rien s'ils bavent tous devant elle, s'ils sont prêts à se faire défroquer pour elle...Alors oui celui-là ils ont perdu le contrôle, ses deux potes sont allés trop loin, le spectacle était à vomir et elle n'a pas bougé. C'est vrai...mais elle a tellement d'autres merdes à gérer, quoi à la fin, il aurait fallu qu'elle appelle les flics? Qu'elle leur dise d'arrêter? Mais elle en a besoin de ces paillettes, de ce champagne sur le champs, de ce fric, de cette vie hors de la cité pour échapper à sa mère dépressive, à cette doudoune rose qu'elle ne peut plus voir et à son père qui ne fait rien de sa vie...Voilà la petite barbare c'est ça.
Dans un roman court, qui se lit d'un coup, telle happée par la petite Barbare, on entre dans son univers. Elle est déjà en prison au début du récit et elle retrace son histoire dans son journal, le quotidien de sa cité, comment l'appel de la vie facile en "usant" de son corps a rapidement été sa seule source de liberté, d'espoir, d'apport pécunier aussi. Elle raconte comment la machine s'est emballée, comment son ami noir Esba qu'elle admire, lui aussi s'emballe et perd peut-être même le contrôle. Elle raconte son quotidien en prison et encore une fois les dérives des gardiens, du dirlo sur elle, sur ce corps qui servait d'appât à l'extérieur, qui lui sert à avoir une vie un peu plus confortable à l'intérieur. J'ai aimé cette ado-femme perdue. Sa parole est violente mais aussi très clairvoyante. Elle a la tête sur les épaules et peut en quelques lignes analyser une situation de notre société de manière très juste. Ce n'est pas un roman sur les banlieues et leurs difficultés. C'est un récit-témoignage d'une vie. C'est un constat de faits. On ne tape forcément sur les plus riches, ni sur les politiques. C'est en fait un roman très simple, dans une écriture hachée, violente, un peu brute mais pas que...La petite Barbare lit, a eu son premier coup de coeur littéraire avec Marguerite Yourcenar (hann moi aussi) et les références littéraires sans être trop nombreuses (j'ai beaucoup aimé le clin d'oeil aux héros masculins des oeuvres classiques qui ne subissent que des échecs) apportent un vrai relief au texte.
En bref un roman que j'ai lu d'une traite, que j'ai bien aimé. J'aurais été curieuse de voir même ce qui se passait après, une fois sur le bitume devant la prison. J'ai un coup de coeur particulier pour la couverture sur laquelle je n'avais vu que des mains au début. Une auteure que je suivrai donc avec plaisir dans un autre style maintenant.
L'auteure tient un blog Laisseparlerlesfilles.
Un livre découvert dans le cadre du beau projet de Charlotte "68 premières fois".
Découvrez l'avis de ma Stéphie avec qui je partage cette lecture aujourd'hui et les avis de Noukette, Jérôme, L'Irrégulière, Séverine.